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    Quelques jours après, je décide de sortir de mon mutisme et appelle ma mère. Nous avons toujours eu une relation compliquée elle et moi. Depuis toute petite, j'ai rapidement compris que quoi que je fasse, ce ne serait jamais assez bien. Ma mère est une éternelle insatisfaite à qui la vie n'offre jamais une minute de répit surtout quand il s’agit de critiquer. Tout y passe : mes amies, ma coiffure, mes vêtements, mes résultats scolaires. Il y a toujours quelque chose qui ne va pas. Heureusement pour moi, mon père n’est pas comme ça. Lui, il est plutôt du genre à encourager. Je me demande parfois comme ils font pour être toujours mariés après tout ce temps car je ne suis pas la seule à subir les critiques de ma mère à la maison. Mon père a largement sa part de reproches. C’est peut être ça aussi l’amour : être capable de supporter les pires défauts de son conjoint. Se mettre en boule et attendre que l’orage passe.

    Je sais qu'en m'enfuyant de mon mariage j’ai déçu ma mère et il va falloir que j'affronte son mécontentement. Je prends donc mon téléphone et mon courage et je compose le numéro de chez mes parents. Heureusement pour moi, c'est mon père qui répond. Dès que j'entends sa voix dans le combiné je reprends mon souffle:

    - Allo ? Papa ?

    - Emma ? Ma chérie ! Ou es-tu ? Comment tu vas ?

    Je n'ai pas le temps de répondre que ma mère arrache le téléphone à mon père. Elle devait être en embuscade à côté du téléphone pour réagir aussi vite. Je me prépare donc à affronter la tempête :

    - Emma ! Mais qu'est-ce qu'il t'a pris ?

    - Bonjour maman.

    - Emma ! Ou es-tu ? Tu ne peux t'enfuir comme ça le jour de ton mariage ! Qu'est-ce qu'il t'a pris ?

    - Maman, écoute, c'est compliqué. Je me suis rendue compte que je faisais une bêtise et j'ai préféré tout arrêter avant d'aller plus loin, c'est tout.

    - C'est tout ! Et tu as pensé à nous ? Tu as pensé à Fabrice ? Et à ta belle famille ?

    - Non, je suis désolée je n'ai pensé qu'à moi. Ecoute maman, je suis désolée, je sais que je vous ai fait du mal à tous mais je n'ai pas pu.

    Je sais que ma mère se retient de me crier dessus, je sais qu'elle est contente de me parler aussi. Cependant ses reproches commencent sérieusement à m'énerver. Ce n'est pas de cela que j'ai besoin, je veux qu'elle me soutienne, qu'elle m'encourage. Je ne veux même pas qu'elle me comprenne, je veux juste qu'elle soit là pour moi sans me juger ni me critiquer. Mais apparemment c'est un peu trop pour elle. Je le comprends quand ma mère se met à hurler dans le téléphone :

    - Tu n'as pas pu ? Tu n'as pas pu ? Mais enfin Emma, il fallait y penser AVANT de te retrouver devant la mairie ! Je n'arrive pas à y croire. Tu penses qu'on fait toujours ce qu'on veut ? Tu rêves ma fille ! Tu avais l'occasion de faire un beau mariage et tu l'as gâché.

    - Ah oui ? Parce qu'un beau mariage est plus important pour toi que mon bonheur ?

    Avant qu'elle ne puisse me répondre mon père lui arrache le téléphone des mains et ajoute :

    - N'écoute pas ta mère Emma, tu sais comment elle est. Si tu es mieux comme ça, tant mieux. Tu n'as de compte à ne rendre à personne. Il faut que je te laisse, ta mère est en train de tout casser dans la cuisine mais ne t'inquiète pas pour elle, elle se remettra. Il lui faut juste du temps. Je t'embrasse.

    J'ai à peine le temps de l'embrasser à mon tour qu'il a déjà raccroché. Je reste avec le téléphone dans la main encore tremblante après cette discussion. Je m'effondre sur le lit et me met à pleurer.

     


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  • Hello !! Je vous propose une petite nouvelle écrite pour un concours. Bonne lecture.

     

    J'ai toujours adorée les bibliothèques. Dès que j'ai su lire, j'aimais me balader dans les rayons, flâner au détour des étagères, prendre les livres, les replacer. Tenir entre mes doigts les couvertures plastifiées me donnais le sentiment de détenir un grand secret. Je me demandais qui avait bien pu emprunter ce livre avant moi. Était-ce une fille ? Un garçon ? Etait-il plus jeune ou plus âgé que moi ? Quelle était son histoire ? Pourquoi avait-il emprunté ce livre ? L'histoire lui avait-elle plu ou pas ? Ce livre que je tenais entre mes doigts allait vivre avec moi pendant quelques semaines. Il allait tout savoir de moi. Heureusement que les livres ne savent pas parler sinon ils pourraient en raconter des choses !

    Ce jour-là, quand je me dirige vers la bibliothèque j'ai un livre bien précis en tête. C'est la maîtresse qui nous en a parlé à l'école et Solène, ma meilleure amie, m'a dit qu'elle l'avait emprunté. Maintenant c'est mon tour, j'ai envie de découvrir cette histoire qui m'a l'air si passionnante.

    J'attends fébrile devant les grilles que la bibliothécaire ouvre les porte. Elle apparait enfin avec sa queue de cheval brune qui se balance au sommet de son crâne au rythme de ses talons aiguilles. Elle porte un joli tailleur beige, on dirait une fée tant elle est belle

    Dès que les portes s'ouvrent je me dirige vers les étagères. Je cherche, je fouille mais aucune ne trace de mon livre. Serait-il déjà emprunté ?

    Je vais voir la bibliothécaire et lui demande : 

    - Est ce que vous auriez " un long jour d'automne" ?

    Elle regarde sur son ordinateur et me dit :

    - Oui, nous l'avons et il n'est pas emprunté. Tu ne l'as pas trouvé ?

    Je fais non de la tête et la bibliothécaire se dirige vers les étagères en me disant d'attendre ici.

    Quelques minutes plus tard, je la vois traverser la bibliothèque et s'engouffrer dans une petite pièce au fond à côté des toilettes.

    Encore un peu d'attente et je la vois ressortir avec un livre à la main qu'elle me tend.

    - Et voilà ! Me dit-elle satisfaite.

    Je sers le livre contre moi, heureuse et lui demande en bredouillant :

    - Comment avez-vous fait ? Je l'ai cherché partout !

    La bibliothécaire se penche vers moi et me dit avec un clin d'œil.

    - Nous, les bibliothécaires, nous avons un secret. Quand un livre est perdu nous faisons appel aux fées des bibliothèques. Elles arrivent toujours à les retrouver.

    J'avais huit ans à l'époque. 

    Aujourd'hui, j'ai vingt-cinq ans et c'est moi qui fais rêver les enfants quand je leur raconte l'histoire des fées qui habitent dans la bibliothèque ou je travaille. 

     

     

     

     

     


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    Lorsque je me réveille le lendemain, j'ai un peu de mal à savoir ce que je fais là. Je suis dans un lit étranger, je ne reconnais pas la chambre ni les bruits qui m'entourent.

    Malheureusement ma mémoire ne met pas longtemps à s'activer et les événements de la veille me reviennent. Dans un premier temps, je me dis que je vais rester terrer dans la chambre d'hôtel pour la journée mais quand j'ouvre les volets et que je vois le beau soleil illuminer la montagne, je me dis qu'une petite balade me remettrait peut être les idées au claire.

    Après un copieux petit déjeuné, je prends donc la route à pied un peu au hasard. Je déambule dans les rues, repérant le boucher, le boulanger et la poste. Je respire l'odeur des fleurs, croise les gens qui vont au marché. Je prends le temps pour moi, chose que je n'ai pas faite depuis une éternité surtout avec les préparatifs du mariage.

    Alors que je marche j'aborde le bâtiment de la mairie. Je regarde le drapeau qui flotte sur le fronton, les fleurs bien entretenues qui la borde. Le bâtiment est beau avec son crépi beige et son grand escalier. Je me demande quel effet j'aurai fait avec ma belle robe de mariée sur ces marches. Alors que je me rends compte que je m'égare j'entends soudain un drôle de bruit derrière moi. J’ai à peine le temps de me demander ce que c’est que « PSHHHHITTTT !! », je me fais copieuse arroser. J’essaie de reculer mais je sens que c’est pire, sur le côté ce n’est pas mieux. Je ne vois rien, je suis dans un brouillard d’eau et en quelques secondes, je suis trempée.

    Soudain, je sens une main qui me tire vers l’arrière. Je ris et me retrouve au sec ou je peux regarder mon sauveur. Il s’agit d’un bel homme qui semble avoir le même âge que moi. Il rit lui aussi et me dit :

    -     Désolée, l’arrosage est un peu traitre en ce moment.

    -     Merci de m’avoir sorti de là, je réponds.

    -     Mais de rien. Je m’appelle Gabriel. Je travaille à la mairie.

    -     Emma.

    -     Je ne vous ai jamais vu par ici ?

    -     Je viens d’arriver.

    -     Oh ! Vous restez combien de temps parmi nous ?

    -     Une semaine.

    Il me dit alors qu’il est désolé, qu’il doit aller travailler mais que si je veux nous pouvons aller boire un verre tous les deux. J’accepte et nous nous séparons. Puis je décide de retourner à l’hôtel histoire de passer des vêtements secs.

     Le mariage me parait loin quand je remonte dans ma chambre. C'est donc avec curiosité que je décide d'allumer mon portable qui ne tarde pas à biper avec insistance.

    Je vois que Fabrice m'a laissé un message me demandant de le rappeler. Aujourd'hui, je n'ai pas pensé à lui, ni aux événements de ses derniers jours. Après ce constat, je comprends que j'ai pris la bonne décision et que de toute façon, je ne peux pas revenir en arrière. Je décide donc de l'appeler.

    Après deux sonneries, il répond :

    - Emma ! Tu vas bien ?

    - Bonjour Fabrice. Oui ça va.

    - Où es-tu ?

    - A la montagne.

    - Où ?

    - A la montagne, je répète exaspérée.

    - Tu détestes tout ce qui n'est pas la ville...

    - Je sais, mais j'ai envie de changer.

    - Tu es où exactement ?

    - Fabrice, je ne veux pas te le dire...

    - J'ai le droit de savoir où tu es et avec qui. Tu es ma femme !

    - C'est là que tu te trompes, nous ne sommes pas mariés, je me suis enfui pour mémoire !

    - Emma ! On pourrait au moins parler, reviens à la maison !

    Il a pris son petit ton autoritaire pour me dire cela, celui qu'il prend pour parler aux enfants ou à ses employés quand ils ont fait une bêtise.

    Vexée, je lui réponds :

    - Non Fabrice, je n'ai pas prévue de rentrer tout de suite, je suis désolée.

    - Mais pourquoi ? Tu ne peux pas partir comme ça, si c'est le mariage le problème tu aurais dû me le dire, on n'est pas obligé de se marier. Je sais que mes parents seront déçus mais ils comprendront. Emma, je ne peux pas vivre sans toi et...

    Je le coupe :

    - Fabrice, le problème ce n'est pas le mariage, le problème c'est nous deux, on n’est pas heureux ensembles... Ou du moins, je ne suis pas heureuse. Je suis désolée.

    Avant qu'il n'ajoute quelque chose, je raccroche et je réalise soudain que je me sens bien mieux. Un énorme poids vient de s'envoler de mes épaules. Je prends alors une décision : je vais m'installer ici, trouver un travail et un appartement et repartir à zéro. Refaire ma vie sur des bases différentes, faire ce que j'ai toujours eu envie de faire.

    Oui mais quoi ?

     

     

     


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  • Je te regarde dormir dans ton petit lit. Tu es si beau, si paisible alors que tu rêves. Je voudrai que ce moment ne s'arrête jamais, que tu restes ainsi : innocent, curieux et petit.

    J'aimerai te protéger de tout, protéger ton corps de la maladie, protéger ton coeur de la tristesse et protéger ta naïveté d'enfant de ce monde si cruel dans lequel nous vivons.        

     

                                                                                                                                                                                                                     

    Je voudrai t'enfermer dans ma bulle où tu ne connaîtrais aucunes douleurs, où il ferait toujours chaud, où tu serais bien. 

    J'aimerai que tu ne connaisses ni la mort, ni la perte, ni le chagrin.                                                                                                                                                                        

     

     

    J'aimerai être toujours là pour toi, ne jamais faire d'erreurs et prendre les bonnes décisions aux bons moments.                                                               

    J'aimerai faire de ta vie des instants de rires, de couleurs et de dessins. Dans cette bulle, le loup ne mangerait pas le Petit Chaperon Rouge, Blanche Neige ne serait pas orpheline et la Petite Fille Aux Allumettes n'existerait pas. 

                                                                                                    

    Malheureusement, je ne suis qu'une mère. Je ne peux que soigner tes blessures et écouter tes souffrances. Je ne peux qu'être à tes côtés et préserver le plus longtemps possible ta naïveté d'enfant.                                                          

                                                                                                   

     

    Certains diront que c'est déjà bien assez mais pour moi qui suis ta mère ce n'est et ce ne sera jamais suffisant.                                                                           Pardonne moi pour toutes les erreurs que je vais commettre, pardonne ma fatigue qui parfois me fait perdre patience. Pardonne moi d'aller travailler au lieu de te garder près de moi. Enfin, pardonne moi ces mensonges que je te dis parfois car la vérité est trop cruelle.                                                                     J

    e t'aime mon enfant, mais je ne suis qu'une femme.

     

     


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    Lorsque je passe la porte de "Chez Ginette", je suis tout de suite mise dans l'ambiance. Je distingue un comptoir en bois avec une sonnette dorée, derrière accroché au mur on voit des clous avec des clefs numérotées suspendues, un présentoir est rempli de brochures avec les activités de la région. Derrière le comptoir, une brune aux cheveux courts lit un magazine people en mâchant du chewing gum. Elle ne sourcille pas quand j’entre habillée de ma robe de mariée ce qui est un bon point pour elle.

    - Bonjour, me dit-elle avec un sourire en fermant le magasine, je suis Edna, que puis-je pour vous ?

    - Je voudrais savoir s'il vous reste des chambres ?

    - Oui, combien de temps allez-vous rester parmi nous ?

    La question a l'air bête (et vu ma tête elle l'est) mais je n'ai pas pris le temps d'y réfléchir. Je ne sais pas ce que j'attends de ce séjour alors déterminer une durée est un peu hors propos.

    - Une semaine, je fini par répondre.

    Edna regarde dans son registre de réservation et attrape une clef derrière elle.

    - Vous avez la 125. C'est au premier étage. Je vais vous aider pour les bagages.

     Edna fait le tour du comptoir et me conduit jusqu'à ma chambre.

    - Je peux vous déposer un plateau de sandwichs si vous voulez, me propose-t-elle pendant que nous partons à l'assaut de l'escalier.

    Je réalise que je meurs de faim et accepte sa proposition.

    La chambre est simple mais jolie : un lit en bois clair, une armoire, une table et une chaise. Le parquet marron donne un air chaleureux à l'ensemble. La salle de bain est petite mais fonctionnelle. En plus, j'ai vu sur les montagnes et pas sur le parking.

    Je dispose ma valise sur mon lit et attend qu'Edna quitte la pièce.

    Je range rapidement mes affaires et jette un œil à mon portable. Vingt-cinq messages ! Essentiellement ma mère, Rebecca, Luis et Fabrice. Je décide de ne pas les écouter pour le moment. J'ai besoin de mettre mes idées au clair. Je fais tout de même un texto à ma mère et à Rebecca pour les informer que je vais bien. Je précise à mon amie que je vais prendre quelques jours de congés. Puis, j'éteins mon portable et passe dans la salle de bain.

    Malgré la couleur framboise des murs, j'ai le teint blafard et les yeux rouges à force d'avoir pleuré. Mon mascara réputé à toutes épreuves a coulé sur mes joues en laissant de grosses traces noires et ma coiffure ne ressemble plus à rien. Je suis fatiguée et ça se voit.

    Je commence par retirer les épingles de mes cheveux. Au fur et à mesure que je redeviens moi-même, je prends conscience de ce que j'ai fait. Quitter mon mariage, ruiner ma carrière, mes parents qui ne me pardonneront jamais, la liste de mes erreurs de ses dernières vingt-quatre heures est longue.

    Les larmes se remettent à couler. Je retire tant bien que mal ma robe et entre dans la baignoire. Je fais ruisseler l'eau chaude sur ma tête mais ça ne va pas mieux. Les idées noires sont toujours là. Comment j'ai bien pu me mettre dans un guêpier pareil ? Quelle idée de me marier !

    Au bout de quelques minutes, je sors de la baignoire et entreprends d'effacer les dernières traces de maquillages sur mes joues, un peu comme si je voulais effacer cette journée.

    Je m'enroule ensuite dans un peignoir et retourne dans la chambre. Un plateau avec deux sandwichs, un verre, une salade de fruits et une bouteille d'eau m'attendent. J'allume la télévision et mange distraitement. J’essaie de ne pas penser un peu comme si je venais de me faire opérer et que j’étais en salle de réveil. Je suis encore sous le coup de l’anesthésie.

    Lorsque je me couche ce soir-là, je me sens bien seule alors que j’aurai dû être entourée de mes amis et de ma famille en train de faire la fête à ma soirée de mariage.

     


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