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    Ma grand-mère avait coutume de dire que je fonctionnais comme une voiture diesel : très longue au démarrage mais une fois lancée, rien ne m'arrête. 

    Suite à cette conversation quelque peu désagréable avec Fabrice et ma mère, je décide de prendre ma vie en main et de m'installer à Montfleuri. Certes, la vie chez "Chez Ginette" est très agréable mais il me faut mon propre chez moi. Ainsi après plusieurs jours de recherche, je déménage dans un magnifique deux pièces au deuxième étage d'une maison, rue de la mairie. J'ai vu sur les montagnes, la mairie et l'église du village. Il faut dire qu'à Montfleuri, il n'y a que trois rues : Rue de la mairie (où se trouve la mairie), Rue du lavoir (où se trouve l'ancien lavoir) et Rue des commerces (je ne vous fais pas un dessin, tout le monde a compris !). Heureusement, la déchetterie est dans le village voisin, sinon on aurait eu le droit à Rue de la déchetterie ou Rue des poubelles !

    L'appartement est plutôt modeste avec une pièce principale comprenant salon et cuisine et deux autres pièces ou l’on trouve une chambre et une salle de bain avec les toilettes. Les murs sont décorés dans le pur style montagnard avec du lambris de partout que le propriétaire a eu la gentillesse de peindre en blanc cassé.

    Certes, je manque cruellement de rangements et ça me change de mon quatre pièces que je partageais avec Fabrice mais au moins c'est chez moi. Et puis j'ai voulu cette vie alors autant prendre les choses du bon côté.

    Après l'appartement, je me lance dans la recherche d'un travail. Je ne peux pas continuer à vivre sur mes réserves, d'autant plus que je compte bien investir cet argent. Dans quoi ? Pas la moindre idée pour l'instant mais je suis sûre que je ne veux pas dépenser mon capital en restant à l'hôtel en me tournant les pouces.

    Je commence par écrire un mail à Rebecca et Luis. Je leur explique que je veux prendre un congé sabbatique afin de faire le point. Je joins un petit courrier à Rebecca histoire de faire les choses dans les règles administrativement parlant. Elle me répond presque tout de suite pour me dire qu'elle transmet mon courrier et qu'une réponse suivra dans quelques jours.

    J'en profite pour les inviter à venir se ressourcer à la montagne. Le rendez-vous est pris pour quelques semaines plus tard à l'occasion de la fête de l'été.

    Je vois beaucoup Gabriel. C'est un bon ami, toujours de bon conseil.

    Une fois l'accord du congé sabbatique obtenu, je décroche un poste de serveuse dans l'unique restaurant de Montfleuri. Ce n'est pas le job de ma vie mais ce travail a le mérite de me laisser du temps pour réfléchir à mon avenir. En effet, je ne travaille que le midi et quelques week-ends. Cet emploi est cependant plus fatiguant que dans mon souvenir (j'avais été serveuse dans un restaurant durant mes études), il n'est pas gratifiant non plus mais il me permet de payer les factures et la nourriture sans avoir à trop toucher à mes réserves. Chose très importante à mes yeux car j'ai beaucoup de projets et je me suis fixée comme objectif d'en réaliser au moins un.

    C'est ce que j'explique à Rebecca et Luis quand ils viennent me voir chez moi pour la fête de l'été. Luis en profite aussi pour me dire les derniers potins de l'entreprise. Apparemment, mon départ a été un choc pour tout le monde et les rumeurs les plus sordides circulent sur mon compte. Ainsi, j'ai appris que je suis atteinte d'une maladie grave et que je viens d'emménager avec ma petite amie.

    Ceci ne me surprend pas vraiment : cette société est un nid de commères et j'ai déjà entendu beaucoup de choses au début de ma relation avec Fabrice.

            - Que comptes-tu faire avec Fabrice ? Me demande Rebecca alors que nous marchons dans les rues de Montfleuri en direction du lieu de la fête

    - Rien, pourquoi ?

    - Tu ne crois pas que tu lui dois une petite explication ?

    La question m'a déjà traversée l'esprit plusieurs fois mais vu notre dernière explication, l'envie est vite repartie. Je hausse les épaules et répond :

    - Je ne vois pas quoi lui dire de plus pour l'instant.

    - Que tu ne veux plus le revoir par exemple, suggère Luis. Tu sais il dit à tout le monde que tu vas revenir.

    - En tout cas, ajoute Rebecca, je sais pourquoi tu ne veux plus partir d'ici.

    Elle me désigne du menton Gabriel qui se dirige vers nous en souriant.

    - Vous devez être Luis et Rebecca, Emma m’a beaucoup parlé de vous, dit-il en arrivant à notre niveau

    - Oui, et tu dois être Gabriel, fait Rebecca.

    - C'est bien moi.

    J'ai tout de suite senti que le courant passait bien entre mes deux amis et pendant que je virevolte sur la piste de danse avec Luis je réalise que je me sens à ma place à Monfleuri. Cette sensation me fait un peu drôle car ça fait bien longtemps que je n'ai pas ressenti cela. En effet, lorsque j'habitais avec Fabrice, je me sentais plus chez lui que chez moi. Certes, l'appartement me plaisait mais il avait engagé une décoratrice pour refaire l'intérieur et au final, cet endroit ne me ressemblait pas.

    Je comprends soudain que dans cette histoire, je me suis oubliée, je me suis un peu perdue aussi et je compte bien me retrouver.

     


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    Quelques jours après, je décide de sortir de mon mutisme et appelle ma mère. Nous avons toujours eu une relation compliquée elle et moi. Depuis toute petite, j'ai rapidement compris que quoi que je fasse, ce ne serait jamais assez bien. Ma mère est une éternelle insatisfaite à qui la vie n'offre jamais une minute de répit surtout quand il s’agit de critiquer. Tout y passe : mes amies, ma coiffure, mes vêtements, mes résultats scolaires. Il y a toujours quelque chose qui ne va pas. Heureusement pour moi, mon père n’est pas comme ça. Lui, il est plutôt du genre à encourager. Je me demande parfois comme ils font pour être toujours mariés après tout ce temps car je ne suis pas la seule à subir les critiques de ma mère à la maison. Mon père a largement sa part de reproches. C’est peut être ça aussi l’amour : être capable de supporter les pires défauts de son conjoint. Se mettre en boule et attendre que l’orage passe.

    Je sais qu'en m'enfuyant de mon mariage j’ai déçu ma mère et il va falloir que j'affronte son mécontentement. Je prends donc mon téléphone et mon courage et je compose le numéro de chez mes parents. Heureusement pour moi, c'est mon père qui répond. Dès que j'entends sa voix dans le combiné je reprends mon souffle:

    - Allo ? Papa ?

    - Emma ? Ma chérie ! Ou es-tu ? Comment tu vas ?

    Je n'ai pas le temps de répondre que ma mère arrache le téléphone à mon père. Elle devait être en embuscade à côté du téléphone pour réagir aussi vite. Je me prépare donc à affronter la tempête :

    - Emma ! Mais qu'est-ce qu'il t'a pris ?

    - Bonjour maman.

    - Emma ! Ou es-tu ? Tu ne peux t'enfuir comme ça le jour de ton mariage ! Qu'est-ce qu'il t'a pris ?

    - Maman, écoute, c'est compliqué. Je me suis rendue compte que je faisais une bêtise et j'ai préféré tout arrêter avant d'aller plus loin, c'est tout.

    - C'est tout ! Et tu as pensé à nous ? Tu as pensé à Fabrice ? Et à ta belle famille ?

    - Non, je suis désolée je n'ai pensé qu'à moi. Ecoute maman, je suis désolée, je sais que je vous ai fait du mal à tous mais je n'ai pas pu.

    Je sais que ma mère se retient de me crier dessus, je sais qu'elle est contente de me parler aussi. Cependant ses reproches commencent sérieusement à m'énerver. Ce n'est pas de cela que j'ai besoin, je veux qu'elle me soutienne, qu'elle m'encourage. Je ne veux même pas qu'elle me comprenne, je veux juste qu'elle soit là pour moi sans me juger ni me critiquer. Mais apparemment c'est un peu trop pour elle. Je le comprends quand ma mère se met à hurler dans le téléphone :

    - Tu n'as pas pu ? Tu n'as pas pu ? Mais enfin Emma, il fallait y penser AVANT de te retrouver devant la mairie ! Je n'arrive pas à y croire. Tu penses qu'on fait toujours ce qu'on veut ? Tu rêves ma fille ! Tu avais l'occasion de faire un beau mariage et tu l'as gâché.

    - Ah oui ? Parce qu'un beau mariage est plus important pour toi que mon bonheur ?

    Avant qu'elle ne puisse me répondre mon père lui arrache le téléphone des mains et ajoute :

    - N'écoute pas ta mère Emma, tu sais comment elle est. Si tu es mieux comme ça, tant mieux. Tu n'as de compte à ne rendre à personne. Il faut que je te laisse, ta mère est en train de tout casser dans la cuisine mais ne t'inquiète pas pour elle, elle se remettra. Il lui faut juste du temps. Je t'embrasse.

    J'ai à peine le temps de l'embrasser à mon tour qu'il a déjà raccroché. Je reste avec le téléphone dans la main encore tremblante après cette discussion. Je m'effondre sur le lit et me met à pleurer.

     


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    Lorsque je me réveille le lendemain, j'ai un peu de mal à savoir ce que je fais là. Je suis dans un lit étranger, je ne reconnais pas la chambre ni les bruits qui m'entourent.

    Malheureusement ma mémoire ne met pas longtemps à s'activer et les événements de la veille me reviennent. Dans un premier temps, je me dis que je vais rester terrer dans la chambre d'hôtel pour la journée mais quand j'ouvre les volets et que je vois le beau soleil illuminer la montagne, je me dis qu'une petite balade me remettrait peut être les idées au claire.

    Après un copieux petit déjeuné, je prends donc la route à pied un peu au hasard. Je déambule dans les rues, repérant le boucher, le boulanger et la poste. Je respire l'odeur des fleurs, croise les gens qui vont au marché. Je prends le temps pour moi, chose que je n'ai pas faite depuis une éternité surtout avec les préparatifs du mariage.

    Alors que je marche j'aborde le bâtiment de la mairie. Je regarde le drapeau qui flotte sur le fronton, les fleurs bien entretenues qui la borde. Le bâtiment est beau avec son crépi beige et son grand escalier. Je me demande quel effet j'aurai fait avec ma belle robe de mariée sur ces marches. Alors que je me rends compte que je m'égare j'entends soudain un drôle de bruit derrière moi. J’ai à peine le temps de me demander ce que c’est que « PSHHHHITTTT !! », je me fais copieuse arroser. J’essaie de reculer mais je sens que c’est pire, sur le côté ce n’est pas mieux. Je ne vois rien, je suis dans un brouillard d’eau et en quelques secondes, je suis trempée.

    Soudain, je sens une main qui me tire vers l’arrière. Je ris et me retrouve au sec ou je peux regarder mon sauveur. Il s’agit d’un bel homme qui semble avoir le même âge que moi. Il rit lui aussi et me dit :

    -     Désolée, l’arrosage est un peu traitre en ce moment.

    -     Merci de m’avoir sorti de là, je réponds.

    -     Mais de rien. Je m’appelle Gabriel. Je travaille à la mairie.

    -     Emma.

    -     Je ne vous ai jamais vu par ici ?

    -     Je viens d’arriver.

    -     Oh ! Vous restez combien de temps parmi nous ?

    -     Une semaine.

    Il me dit alors qu’il est désolé, qu’il doit aller travailler mais que si je veux nous pouvons aller boire un verre tous les deux. J’accepte et nous nous séparons. Puis je décide de retourner à l’hôtel histoire de passer des vêtements secs.

     Le mariage me parait loin quand je remonte dans ma chambre. C'est donc avec curiosité que je décide d'allumer mon portable qui ne tarde pas à biper avec insistance.

    Je vois que Fabrice m'a laissé un message me demandant de le rappeler. Aujourd'hui, je n'ai pas pensé à lui, ni aux événements de ses derniers jours. Après ce constat, je comprends que j'ai pris la bonne décision et que de toute façon, je ne peux pas revenir en arrière. Je décide donc de l'appeler.

    Après deux sonneries, il répond :

    - Emma ! Tu vas bien ?

    - Bonjour Fabrice. Oui ça va.

    - Où es-tu ?

    - A la montagne.

    - Où ?

    - A la montagne, je répète exaspérée.

    - Tu détestes tout ce qui n'est pas la ville...

    - Je sais, mais j'ai envie de changer.

    - Tu es où exactement ?

    - Fabrice, je ne veux pas te le dire...

    - J'ai le droit de savoir où tu es et avec qui. Tu es ma femme !

    - C'est là que tu te trompes, nous ne sommes pas mariés, je me suis enfui pour mémoire !

    - Emma ! On pourrait au moins parler, reviens à la maison !

    Il a pris son petit ton autoritaire pour me dire cela, celui qu'il prend pour parler aux enfants ou à ses employés quand ils ont fait une bêtise.

    Vexée, je lui réponds :

    - Non Fabrice, je n'ai pas prévue de rentrer tout de suite, je suis désolée.

    - Mais pourquoi ? Tu ne peux pas partir comme ça, si c'est le mariage le problème tu aurais dû me le dire, on n'est pas obligé de se marier. Je sais que mes parents seront déçus mais ils comprendront. Emma, je ne peux pas vivre sans toi et...

    Je le coupe :

    - Fabrice, le problème ce n'est pas le mariage, le problème c'est nous deux, on n’est pas heureux ensembles... Ou du moins, je ne suis pas heureuse. Je suis désolée.

    Avant qu'il n'ajoute quelque chose, je raccroche et je réalise soudain que je me sens bien mieux. Un énorme poids vient de s'envoler de mes épaules. Je prends alors une décision : je vais m'installer ici, trouver un travail et un appartement et repartir à zéro. Refaire ma vie sur des bases différentes, faire ce que j'ai toujours eu envie de faire.

    Oui mais quoi ?

     

     

     


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    Lorsque je passe la porte de "Chez Ginette", je suis tout de suite mise dans l'ambiance. Je distingue un comptoir en bois avec une sonnette dorée, derrière accroché au mur on voit des clous avec des clefs numérotées suspendues, un présentoir est rempli de brochures avec les activités de la région. Derrière le comptoir, une brune aux cheveux courts lit un magazine people en mâchant du chewing gum. Elle ne sourcille pas quand j’entre habillée de ma robe de mariée ce qui est un bon point pour elle.

    - Bonjour, me dit-elle avec un sourire en fermant le magasine, je suis Edna, que puis-je pour vous ?

    - Je voudrais savoir s'il vous reste des chambres ?

    - Oui, combien de temps allez-vous rester parmi nous ?

    La question a l'air bête (et vu ma tête elle l'est) mais je n'ai pas pris le temps d'y réfléchir. Je ne sais pas ce que j'attends de ce séjour alors déterminer une durée est un peu hors propos.

    - Une semaine, je fini par répondre.

    Edna regarde dans son registre de réservation et attrape une clef derrière elle.

    - Vous avez la 125. C'est au premier étage. Je vais vous aider pour les bagages.

     Edna fait le tour du comptoir et me conduit jusqu'à ma chambre.

    - Je peux vous déposer un plateau de sandwichs si vous voulez, me propose-t-elle pendant que nous partons à l'assaut de l'escalier.

    Je réalise que je meurs de faim et accepte sa proposition.

    La chambre est simple mais jolie : un lit en bois clair, une armoire, une table et une chaise. Le parquet marron donne un air chaleureux à l'ensemble. La salle de bain est petite mais fonctionnelle. En plus, j'ai vu sur les montagnes et pas sur le parking.

    Je dispose ma valise sur mon lit et attend qu'Edna quitte la pièce.

    Je range rapidement mes affaires et jette un œil à mon portable. Vingt-cinq messages ! Essentiellement ma mère, Rebecca, Luis et Fabrice. Je décide de ne pas les écouter pour le moment. J'ai besoin de mettre mes idées au clair. Je fais tout de même un texto à ma mère et à Rebecca pour les informer que je vais bien. Je précise à mon amie que je vais prendre quelques jours de congés. Puis, j'éteins mon portable et passe dans la salle de bain.

    Malgré la couleur framboise des murs, j'ai le teint blafard et les yeux rouges à force d'avoir pleuré. Mon mascara réputé à toutes épreuves a coulé sur mes joues en laissant de grosses traces noires et ma coiffure ne ressemble plus à rien. Je suis fatiguée et ça se voit.

    Je commence par retirer les épingles de mes cheveux. Au fur et à mesure que je redeviens moi-même, je prends conscience de ce que j'ai fait. Quitter mon mariage, ruiner ma carrière, mes parents qui ne me pardonneront jamais, la liste de mes erreurs de ses dernières vingt-quatre heures est longue.

    Les larmes se remettent à couler. Je retire tant bien que mal ma robe et entre dans la baignoire. Je fais ruisseler l'eau chaude sur ma tête mais ça ne va pas mieux. Les idées noires sont toujours là. Comment j'ai bien pu me mettre dans un guêpier pareil ? Quelle idée de me marier !

    Au bout de quelques minutes, je sors de la baignoire et entreprends d'effacer les dernières traces de maquillages sur mes joues, un peu comme si je voulais effacer cette journée.

    Je m'enroule ensuite dans un peignoir et retourne dans la chambre. Un plateau avec deux sandwichs, un verre, une salade de fruits et une bouteille d'eau m'attendent. J'allume la télévision et mange distraitement. J’essaie de ne pas penser un peu comme si je venais de me faire opérer et que j’étais en salle de réveil. Je suis encore sous le coup de l’anesthésie.

    Lorsque je me couche ce soir-là, je me sens bien seule alors que j’aurai dû être entourée de mes amis et de ma famille en train de faire la fête à ma soirée de mariage.

     


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    On dit souvent que rien n'arrive pas hasard. C'est précisément le sentiment que j'ai sur ma rencontre avec Rebecca. A l'époque, j'étais à la fac, un peu perdue dans mes études de chimie ne sachant pas trop ou ça allait me mener.

    Avec Rebecca, nous avions un cours de chimie pratique en commun. Ce cours me terrorisait, enfin surtout Monsieur Ugigne le professeur un peu fou qui nous avait été assigné. Il prenait un malin plaisir à choisir une tête de turc différente à chacune de nos rencontres, transformant ce moment qui aurait pu être récréatif en véritable torture. En effet, la tête de turc passait en général deux heures au tableau à répondre à la question du professeur sur l'expérience en court. Si nous avions le malheur de mal répondre, il nous tournait en ridicule. S'était déjà suffisamment difficile d'être au tableau mais en plus, on avait la pression de la bonne réponse. Nous avions donc pris le parti de nous faire le plus discret possible et surtout de ne pas arriver en retard sous peine de se faire remarquer et donc interroger.

    Pas de chance pour moi, ce matin-là, j'avais eu une double panne. Une panne d'oreiller, tout d'abord, qui m'avait fait me lever avec une demi-heure de retard. Afin de ne pas arriver en retard, je décidais de sauter le petit déjeuner et de grignoter quelques biscuits dans la voiture. C'est là qu'était intervenue ma seconde panne. La voiture avait tout simplement refusé de démarrer (c'est la batterie, ma bonne dame, m'avait dit plus tard le garagiste, je savais bien que j'avais oublié un truc hier soir).

    Afin de ne pas me mettre plus en retard, je filais prendre le bus en espérant qu'il n'arrive pas trop tard. Heureusement pour moi, je n'habitais pas loin de la fac et le bus fut rapidement là. Lorsque je franchissais les portes de la salle de cours, je n'avais que cinq minutes de retard. Pas beaucoup pour un étudiant mais déjà trop pour Monsieur Ugigne. Je me préparais déjà mentalement à passer mes deux prochaines heures au tableau, sauf qu'en passant la porte je constatais que mon prof n'était pas là. Avait-il eu lui aussi une double panne ? Non, il était simplement sortit chercher des éprouvettes dans la salle qui leur servait de stockage pour le matériel scientifique. Il ne restait qu'une place, celle à côté de Rebecca. Je me dépêchais de m'installer espérant ainsi tromper Monsieur Ugigne sur mon moment d'arriver. Je regardais autour de moi et constatait que tout le monde planchait sur une feuille polycopiée. Devant moi pas de feuille. Ca y et s'était terminé, il allait revenir d'un moment à l'autre et me prendre à partie.

    - Tient, me dis alors Rebecca en me tendant une feuille, il m'en a donné deux.

    Je pris le polycopié et remerciais chaleureusement ma nouvelle amie car dans ce cours s'était un peu chacun pour soi. Ainsi quand Monsieur Ugigne revient quelques minutes plus tard, il put choisir une autre tête de turc que moi.

    Afin de remercier Rebecca, je lui proposais de boire un verre dans l'un des bars d'étudiant qui pullulait autour de la fac. Elle accepta et c'est comme ça que commença notre belle amitié. Par la suite, même quand je me suis lancée dans mes études de commerce, nous sommes toujours restées en contacte. Nous avons même partagé un appartement pendant quelques temps. En effet, Rebecca venant de se séparer de son petit ami, elle s’était retrouvée sans toit, je lui avais donc proposé mon canapé le temps de se retourner. Toutes les épreuves que nous avions traversées ensemble nous avaient soudées et rapprochées. Je ne sais pas ce que je serais devenue si elle ne m’avait pas proposé le poste d’assistante dans sa boite. Et je pense qu’elle ne sait pas ce qu’elle serait devenue si je ne l’avais pas hébergé après sa rupture. Mais après tout c’est à ça aussi que servent les amis, non ?

     


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