• Palace

     - Babeth, il faudra aller faire la 114. 

    Babeth soupire en soufflant la fumée de sa cigarette. Elle savait que Marie, sa chef, lui demanderait cela car elle avait vu quelques minutes plus tôt le couple de la chambre 114 quitter le palace. Elle était en train de faire les poussières sur les meubles du hall quand elle les avait aperçus. Lui, grand, brun, élégant dans son complet gris et ses chaussures bien cirées. Elle, blonde, mince, dans sa jolie robe cache cœur noire et ses escarpins. Depuis le temps que Babeth travaille au palace elle en a vu passer des riches. C'est l'avantage de travailler ici, ça permet de côtoyer du beau monde, mais toutes ses richesses la rend parfois envieuse.

    Avec son mari ouvrier, ils arrivent tout juste à payer les factures et la nourriture. Oh ! Elle ne se plaint pas, elle est bien rémunérée au palace, surtout pour faire du ménage mais voir que ces gens sont capables de dépenser un mois de salaire pour dormir dans une suite l'a toujours un peu intriguée.

    Babeth écrase sa cigarette et regagne la remise pour attraper son chariot de ménage. Elle espère que les locataires d'un soir de la chambre 114 ne lui ont pas laissé de surprises. Parfois, les riches ont des lubies, ils demandent du champagne et des chocolats hors de prix pour ne pas y toucher. Ou alors, ils retournent complètement la chambre, laissant des affaires sales et transformant le sol de la salle de bain en pataugeoire.

    Les chambres sont nettoyées tous les jours dès que les clients quittent le palace. Quelques fois, Babeth sait qu'elle n'a pas beaucoup de temps pour faire le lit, passer l'aspirateur, nettoyer la baignoire avant qu'ils ne reviennent. En retapant les oreillers, elle hume les parfums des champoings de ces dames, ou encore l'eau de toilette de ses messieurs en suspendant une veste.

    L'ascenseur s'ouvre. Elle est arrivée. Babeth s'arrête devant la chambre 114. Toujours frapper avant d'entrer, on ne sait jamais. Elle s'exécute et annonce d'une voix forte et claire :

    - Femme de chambre.

    Pas de bruit. Babeth tend l'oreille et recommence son rituel une seconde fois. Rien. Les clients sont partis. Elle glisse son passe magnétique dans la serrure de la porte. Le voyant vert s'allume, la voie est libre, la fée du logis va entrer en action.

    La porte s'ouvre. Les clients ont laissé les rideaux fermés,  ce qui rend l'atmosphère de la chambre lourde et sombre. Comme c'est dommage,  il fait si beau dehors.

    Babeth écarte les rideaux,  ouvre la fenêtre, se retourne et pousse un cri de stupeur. Là,  couché dans le lit, le monsieur de la chambre 114 est allongé,  ses yeux sans vie fixent le plafond. Comment est-ce possible ? Babeth l'a vu partir. Quand les clients oublient quelque chose dans la chambre c'est le maitre d'hôtel qui va le chercher pendant que le client s'installe confortablement au bar.

    Pourtant il est là couché devant elle. Il a peut-être eu une attaque, il est peut-être encore en vie. Babeth s'approche lentement et prend son poult mais soudain elle voit le sang encore frais qui imbibe les draps et le matelas.

    Son cri de terreur retenti dans tout le couloir.

     

    « La grèveNaufragée »

  • Commentaires

    1
    Mercredi 14 Mai 2014 à 12:11

    C'est génial

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    2
    Mercredi 14 Mai 2014 à 12:36
    3
    Mardi 15 Juillet 2014 à 01:48

    J'adore cette nouvelle tu as beaucoup d'inspiration et il y aura une suite pour cette nouvelle?happy

    4
    Mardi 15 Juillet 2014 à 08:54

    Merci beaucoup!  Pour l'instant non vu que je suis sur un autre projet. Cependant de nombreuses personnes m'ont demandé une suite alors qui sait... peut être un jour...

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