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    La ballade de Petibout

     

                   Ça y est. Les premières semaines sont passées, vous avez appris à mieux connaître votre enfant et vous vous sentez enfin prête. C'est décidé aujourd'hui vous reprenez un semblant de vie social. Finis de passer ses journées en pyjama avec une serviette éponge sur l'épaule. Finis d'avoir les cheveux gras en bataille, les cernes jusqu’au milieu des joues à force de donner les biberons en pleine nuit. Finis de se parfumer au vomi de bébé. Aujourd'hui est un nouveau départ. Aujourd'hui vous sortez !

     

    Enfin, remettons les choses dans leurs contextes : vous avez décidé de mettre Petibout dans sa poussette et de faire le tour du quartier. Ce n’est pas non plus le Paris Dakar mais ce premier pas vers la vie social est un enchantement après les couches et les biberons.

     

    Ainsi commence l'expédition. Tout d'abord, attraper Petibout et comprendre comment le faire rentrer dans sa veste sans lui faire mal. Car l'enfant est récalcitrant : il refuse systématiquement de laisser ses bras à l'intérieur de ses manches. Il se débat,  râle et quand enfin vous arrivez à lui fermer le vêtement, vous constatez qu’un bras est sorti de la manche et que son autre main est coincée là ou devrait se trouver son coude. Vous êtes donc parti pour un deuxième round avec la veste. Il faut ensuite l'installer dans la poussette. Il vous faut au moins dix minutes pour installer un Petibout hurlant dans le siège, comprendre comment mettre la ceinture et enfin la fermer. Malheureusement, votre enfant est impatient et à peine avez-vous eu le temps de mettre une chaussure que Petibout se remet à pleurer. D'ailleurs en vous approchant de lui vous sentez comme une odeur caractéristique de couche pleine. Maintenant que vous avez le doute il faut vérifier. Nouvelle séance de pugilat avec la ceinture (mais ce n’est pas vrai il faut avoir bac +5 pour dégrafer ce truc ?), vous déposez Petibout sur le tapis du salon, descendez le pantalon pour tirer sur la couche. Fausse alerte, elle est vide.

     

    Après quelques pleures supplémentaires, vous parvenez enfin à passer la porte de votre appartement. Il fait beau dehors, un vent léger et frais souffle. Tout le monde apprécie, la preuve Petibout ouvre les yeux en grands, admire les voitures, les arbres, respire la pollution et le pollen.

    Vous décidez de prendre le tram, histoire de pousser jusqu'à la poste. Mauvaise idée, à peine arrivé, Petibout se remet à pleurer, râler et se tordre dans la poussette. Devant les regards réprobateurs des usagers, vous préférez vous en tenir au plan initial : le tour du quartier. Le tram sera l'aventure d'un autre jour, quand Petibout sera mieux luné...

     

    Vous commencez à vous détendre, à profiter de ce moment avec votre enfant.

    Cependant, il y a une chose qu'on ne vous a pas dite : le bébé est un aimant à personne âgée. Chaque fois que vous sortez, vous pouvez être sûre de croiser une petite vieille qui ira lorgner dans votre poussette, allant même parfois jusqu'à lui toucher les joues ("ça porte bonheur !" vous a-t-on dit quand vous avez demandé à la grand-mère indélicate ce qu'elle faisait).

    D'ailleurs, n'est-ce pas une personne âgée qui s'avance vers vous en boitillant ? Elle se tord le cou au moment où vous vous croisez afin d'admirer votre merveille. Bonne âme, vous décidez de vous arrêter (vous aurez tout le temps de le regretter plus tard).

    - Oh ! S'exclame-t-elle, comme il est mignon, c'est une fille ou un garçon ?

    Vous répondez fièrement :

    - Un garçon.

    - Il se porte vraiment bien. Vous le nourrissez ?

     

    Un peu étonnée, vous regardez votre fils. Vous voyez ses grosses joues, bien rondes et roses, et ne comprenez pas bien le sens de sa question. Il n'a pas l'air maigre, ni affamé. Dans le doute, vous répondez :

    - Oui.

    - Ah ! C'est bien. Ça se fait de moins en moins.

    Soudain, la lumière se fait. La vieille dame voulait savoir si vous allaitiez Petibout.

    A ce moment vous comprenez qu'il est temps pour vous de continuer votre balade car à la vitesse ou va cette conversation, la personne âgée ne va pas tarder à vous raconter son opération de la cataracte, ainsi que l'opération de la prostate de son mari. Vous la remerciez, lui dites au revoir et reprenez votre balade.

                En rentrant chez vous ce jour-là ; vous vous dites que finalement on n’est bien mieux chez soi.

     


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    En attendant Petibout...

     

     

    C'est une belle journée d'automne et il fait beau quand vous ouvrez vos volets ce matin-là. Le soleil joue avec les nuages, le vent souffle en faisant frémir les feuilles. Aujourd'hui est une journée pour annoncer les bonnes nouvelles. Car oui, c'est officiel, vous avez envie de le crier : vous êtes enceinte. Triomphante, vous avez passé avec succès les épreuves des premiers mois : nausée (et hop ! envolés les kilos en trop récupérés à la fin de l'été), l'angoisse de la fausse couche, l'angoisse de la première échographie (quoi ? Cette crevette est mon bébé ?). Ainsi, vous avez pu voir pour la première fois le merveilleux résultat du mélange génétique entre votre conjoint et vous.

     

    Oui, vous pouvez être fière de vous. Surtout que vous avez lu qu'au cours du second trimestre, vous allez retrouver votre énergie et que vous allez (enfin) vous épanouir dans votre grossesse. Enfin, c'est surtout votre ventre qui va s'épanouir. Ainsi dans quelques mois, quand vous vous assiérez sur une chaise, vous aurez l'impression d'être une baleine échouée sur une plage. Petibout prendra tellement de place que vous vous demanderez ou sont passés vos organes. Le moindre mouvement vous essoufflera (et hop ! disparus les poumons), vous irez aux toilettes toutes les heures (et hop ! disparue la vessie) et souvent après les repas vous sentirez comme un poids sur l'estomac (et hop ! disparu le système digestif). Tout ça pour que Petibout puisse s'épanouir en vous.

     

    Mais ce que vous ne vous imaginiez pas en tombant enceinte c'est que votre corps ne vous appartiendrait plus. Ainsi, lors d'un repas de famille, vous avez dû prendre sur vous lorsque tata Odette a foncé sur votre ventre pour le toucher (sans vous demandez la permission) en s'exclamant : "Oh! C'est beau ! Il paraît que ça porte bonheur", ce à quoi vous avez répondu avec un sourire forcé : "j'en ai de la chance alors !"

     

    Vous avez dû affronter votre père qui n'a parlé qu'à votre ventre : " Bonjour mon bébé ! Et comment ça va là-dedans ? Ta maman te nourrit bien ? Il fait assez chaud ?" et vous de lui dire : " heu, papa, c'est à mon ventre que tu parles là,  moi je suis au-dessus"

     

    Mais tout cela n'est rien. Le pire reste les examens médicaux. Vous saviez que la gynécologue et l'obstétricienne voudraient vous regarder sous tous les angles (et hop ! On vérifie que le col est bien fermé!") Mais ce que vous n'aviez pas prévu c'est de devenir un sujet d'étude pour tous les étudiants de la région. Ainsi, après l'obstétricienne, c'est l'étudiante en gynécologie qui se fait la main sur vous. Puis vient le tour de l'élève sage-femme puis de l'aide-soignante stagiaire. Bref, tout le staff étudiant connait votre anatomie, il faut qu'ils apprennent vous a-t-on dit, ok, mais s’ils pouvaient apprendre avec quelqu'un autre, ça vous arrangerait.

     

    Il faut ensuite rassurer les futurs grands parents :

    " Mais oui belle maman, tout va bien ! 

    - Tu es sûre ?

    - Mais oui.

    - Non mais c'est parce que tu es a trois semaines du terme et moi, j'avais déjà eu mon fils à ce moment-là"

    Quand à une semaine du terme, Petibout toujours bien au chaud dans votre ventre, vous entendrez : " Et tu n'as toujours pas accouché ?" Vous n'aurez qu'une envie : partir en courant. Des millions de fois vous entendrez cette question qui vous donnera l'impression de couver votre œuf trop longtemps comme si Petibout allait dépasser la date de consommation recommandée à cause de vous.  

    Car qu'on se le dise, vous n'y êtes pour rien, c'est lui qui décide tout le monde sait cela, mais ça ne vous empêchera pas d'entendre les remarques du style :" faudra bien qu'il sorte, tu ne pourras pas la garder tout le temps ainsi".

     

    On vous offrira les pires cadeaux du monde (c'est peut-être pour ça qu'il ne veut pas sortir ce bébé), la vieille couverture râpeuse qui se passe de génération en génération dans votre famille, un vieux pyjama ayant appartenu au futur papa (s'était son préféré !). Votre maison va vite devenir un mélange entre un magasin spécialisé pour bébé et un vide grenier. Bon, ne vous plaignez pas parce qu’après l'arrivée de Petibout c'est une succursale de magasin de jouet qui envahira votre intérieur.

     

    C'est à ce moment-là que vous réalisez qu'attendre un enfant n'est pas simple et que le plus compliqué à gérer ce n'est pas la nausée, les vergetures (tient, vous ne saviez pas que vous aviez une veine ici ?), ni même l'accouchement en lui-même. Le plus compliqué, c'est la famille, que l'on ne choisit pas.

     

     

     


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