•  

    Sur la route qui mène à Montfleuri, j'ai tout le loisir de me remémorer ma rencontre avec Fabrice.

    Tout avait commencé quand Rebecca m'avait proposé de travailler dans son entreprise. Elle savait qu'on y cherchait une secrétaire pour le fils du PDG qui dirigeait le service Recherche et Développement. La société était spécialisée dans les aliments sous vide, notamment la choucroute qui avait l'avait fait un peu connaitre du grand public.

    Malgré mon diplôme d'école de commerce, j'acceptais le poste n'ayant plus de revenus depuis quelques mois déjà.

    A la base, s'était du provisoire qui me permettrait de me retourner financièrement en attendant mieux.

    Le premier jour, Rebecca, qui travaillait au service RH, m'avait présentée mon nouveau chef : Fabrice. Avec son regard doux, ses cheveux bruns coupés courts et sa légère bedaine (il fallait bien goûter les nouveautés avant de se lancer dans la commercialisation), il ne m'avait guerre attiré. 

    Un soir, alors que toute l'entreprise se trouvait au bar du coin pour fêter un nouveau contrat, Fabrice m'avait embrassé. La fatigue et l'alcool aidant je ne l'ai pas repoussé.

    Lorsque je repassais la porte du bureau le lundi suivant, j'étais devenue la nouvelle copine officielle du fils du patron. Certes, je n'étais pas attirée par lui, mais ça faisait longtemps que j'étais célibataire et il était plutôt prévenant. J'acceptais donc la situation. 

    Cependant la mère de Fabrice pris la chose assez mal, ne voyant en moi qu'une intrigante voulait mettre la main sur l'entreprise familiale. Elle ne me disait déjà pas bonjour avant et m'ignorais carrément après.

    Afin de tourner court aux rumeurs qui allaient bon train, je décidais de postuler au poste de commercial qui venait de se libérer. Ainsi Fabrice ne serait plus mon supérieur et je pouvais montrer mon attachement à l'entreprise. 

    Quand j'obtiens le poste, les rumeurs continuèrent, on prétendait que je l’avais décroché grâce à ma relation avec Fabrice et Rebecca alors qu'ils n'étaient pas du tout intervenus.

    C'est à cette époque que je rencontrais Luis. Il travaillait lui aussi au service commercial et nous avons vite sympathisé. Luis est... comment dire... à voile et à vapeur. On va dire qu'il aime autant les filles que les garçons mais ça fait des années qu'il est célibataire. Il a un gout très sûr en matière de mode et une langue bien pendue qui n'hésite pas à rependre tous les ragots de la boite. C'est d'ailleurs grâce à lui que j'arrivais à savoir ou en était ma cote de popularité au sein de l'entreprise. Tout le monde se confie à lui alors qu'il ne sait pas tenir un secret plus de deux minutes (ce qui m'a toujours surprise). Mais c'est devenu un bon ami, qui a toujours été là dans les moments difficiles, l'un des rare à savoir (avec Rebecca), la nature de mes sentiments pour Fabrice et je sais très bien qu'il n'a jamais rependu l'information.

    Ma relation avec ma belle-mère se dégrada encore d'autant plus que je me rendais compte que ma liaison avec son fils était une erreur.

    Tout d'abord, plus personne ne m'adressais la parole dans l'entreprise hormis Fabrice, Rebecca et Luis. Ensuite, ma belle-mère me tapait sur les nerfs à critiquer tout ce que je faisais. Enfin, je n'avais pas beaucoup de points communs avec mon petit ami.

    J'aime lire, il déteste ça. Il se lève à cinq heures du matin pour aller camper à la montagne, je hais le camping et encore plus la montagne. J'aime le tumulte de la ville, les magasins, l'art, il déteste tout cela. Nous ne tombions jamais d'accord et au fil du temps ces désaccords chroniques ajoutés à l'absence de sentiments de ma part commençaient à m'inquiéter.

    Ma mère m'avait expliqué un jour que le vrai amour se nourrissait avec le temps. Je décidais donc de patienter et puis ma relation avait fait trop de bruits autour de moi pour que j'y mette un terme maintenant.

    C'est quand Fabrice me demanda en mariage un soir de Noël devant nos deux familles réunies que j'aurai dû dire non. Malheureusement, je n'avais pas eu le courage de le repousser devant tout le monde. Face à mon silence surpris, l'assistance avait pris ça pour un oui et c'est ainsi que je me retrouvais avec la bague au doigt.

    Mon père voulu m'offrir ma robe, ma mère la coiffure et la manucure, bref, il était trop tard pour reculer. Tout le monde semblait tellement enthousiaste que je gardais mes doutes. Je savais que j'aurai dû tout arrêter mais dans le même temps mes relations avec ma belle-famille s’étaient nettement améliorées, sauf que je n'étais toujours pas amoureuse.

    J'avais l'impression d'être une usurpatrice et j'avais du mal à savoir ce qui m'arrivais car j'étais tout de même heureuse de me marier mais pas avec Fabrice.

    Malgré les conseils de Rebecca et Luis pour tout arrêter avant qu'il ne soit trop tard, je ne parvenais pas à parler avec Fabrice.

    Je sais j'aurais dû réagir avant surtout que m'enfuir le jour de mon mariage était loin d'être la meilleure idée que j'avais eu. J'avais réagi au pied du mur et s'était toujours mieux que de divorcer deux ans après, non ?

     

    Au bout de quelques kilomètres je sors de l'autoroute. La route devient rapidement plus sinueuse et avant de m'en rendre compte, je suis arrivée à Montfleuri. Je gare la voiture devant "Chez Ginette", le seul hôtel des environs sûrement. Je regarde ma tête dans le rétroviseur intérieur de la voiture. Je vais faire sensation au village. Tant pis, j'ai l'habitude.

     


    4 commentaires
  • Hello la compagnie ! Je vous met ici le premier chapitre d'un roman commencé l'année dernière. Si vous avez envie de lire la suite, dites le moi !

    A bientôt

     

     Chapitre 1

                            C'est censé être le plus beau jour de ma vie. Celui où je suis la plus belle dans ma robe blanche, avec mon chignon et mes fleurs dans les cheveux. Celui où toute ma famille est réunie pour fêter mon mariage. Celui où j'attends le cœur battant devant la mairie pour faire mon entrée telle une princesse et pourtant…

                Je suis au bras de mon père, mon cœur bat à tout rompre mais ce n'est pas d'excitation. Je suis angoissée parce que je sais que je suis en train de faire une énorme bêtise mais je ne peux plus revenir en arrière.

                - Ca va Emma ? me demande-t-il en me voyant refouler mes larmes.

               -Je ne veux rien lui dire, il est tellement heureux. Je hoche la tête incapable de dire un mot tellement j'ai la gorge nouée. Mon père met mon état sur le compte de l'émotion, me tapote la main et me dit :

              - C'est à nous je crois, tu es prête ?

    J'ai envie de hurler que non, que je ne veux pas de ce mariage, que je me suis trompée mais à la place, je lui souris et nous avançons. La musique retentit. Tout le monde se lève. J'avance comme dans un rêve persuadée que je vais me réveiller. L'adjoint du maire commence son discours. J'écoute d'une oreille. Rebecca, ma meilleure amie, se tient à côté de moi avec un air solennel. Je suis déconnectée de moi. Mon corps est là mais mon esprit vagabonde.

    Soudain, l'adjoint s'adresse à moi, me ramenant immédiatement sur Terre.

                 - Mademoiselle Emma Martin, consentez-vous à prendre pour époux Monsieur Fabrice Lejuste ici présent ?

    Tous les regards se tournent vers moi. Si je ne veux pas de ce mariage, c'est ma dernière chance. Mon hésitation passe pour de la minauderie. On attend mon "oui" retentissant mais je n'y arrive pas. Je jette un œil à Fabrice et me demande comment j'ai fait pour en arriver là. Je me demande comment il va réagir si je pars maintenant...

               - Mademoiselle Martin ? Interroge l'adjoint au maire.

               - Non, je réponds rapidement, je ne peux pas.

    Un murmure inquiet parcours la salle.

                - Pardon ?

                - Non, puis je me tourne vers Fabrice, désolée je ne peux pas.

    J'empoigne mes jupes et cours dans les couloirs de la mairie pendant que tous les invités réalisent ce qui se passe. Je sors et la lumière vive du soleil m'ébloui. Je ne réalise pas encore très bien ce que je viens de faire mais je me sens déjà mieux. 

    Sauf que maintenant,  il me faut fuir et vite. Ma voiture est bien sûr restée à la maison mais j'aperçois au loin la décapotable et le chauffeur que Fabrice a loué pour l'occasion (une surprise de sa part). Je fonce vers lui et lui ordonne comme si je prenais un taxi :

                  - Vite, au 25 rue de La Fontaine.

                  - Mais, je ne suis pas taxi, proteste le chauffeur,  je suis là pour un mariage !

                  - C'est moi la mariée ! Je vous demande juste de me ramener chez moi et vite !

    Le chauffeur comprend que je ne rigole pas et démarre. Au moment où nous passons devant la mairie, je vois Fabrice et mon père suivis par le reste de mes invités qui sortent à leur tour.

                - Emma ! Me crie Fabrice, qu'est-ce que tu fais ?

    Mais je suis déjà loin. Dans la voiture mon cerveau n'a jamais tourné aussi vite. Je rentre chez moi et après ? J'attends sagement que Fabrice arrive ? Sûrement pas ! J'avoue que j'ai un peu honte de ma fuite. J'aurai dû tout arrêter il y a des mois mais je n'avais pas pu et c'est au pied du mur que je réagi et pourtant je le voyais depuis un petit moment le mur ! Quel gâchis !

    Dans mon petit sac mon portable sonne. Je le sors et constate que j'ai 10 appels en absence. Mon Dieu ! 6 viennent de Fabrice, 2 de Rebecca et 2 de ma mère. Plus tard je les rappellerais, plus tard je leur expliquerais, pour l'instant je dois fuir. Je ne pense qu'à ça.

    Lorsque la décapotable s'arrête devant mon immeuble je glisse 20 euros dans la main du chauffeur et lui donne l'ordre de partir vite d'ici.

    J'arrive sans encombre jusqu'à l'appartement et y retrouve son calme presque rassurant. J'observe un moment la décoration que nous avons choisi avec Fabrice, je caresse le meuble de l'entrée. Puis je me ressaisi, je ne dois pas me laisse submerger par les souvenirs, Fabrice n'est pas bête,  il va commencer par venir me chercher ici. D'ailleurs le téléphone fixe sonne en me faisant sursauter. 

    Je file dans la chambre, attrape une grande valise et y met au hasard tout ce qui me tombe sous la main : jeans, pull, tee shirt, chemises, chaussettes, pyjamas. Je cours dans la salle de bain, prends ma trousse de maquillage,  ma brosse à dent, le dentifrice, ma brosse à cheveu et tout ce qui me parait utile sur le moment comme mon gel douche. Culottes et soutiens gorges rejoignent la valise déjà pleine.

    Je prends un petit sac de voyage et y glisse mes paires de chaussures préférées,  je récupère mon sac à main et quitte l'appartement. L'ascenseur arrive assez vite mais bien sûr il n'est pas vide.

                - Bonjour Madame Dubois, je lance sans trop la regarder.

                - Mademoiselle Martin ! C'est le grand jour ?

    C'est la robe de mariée qui a dû la mettre sur la piste, j'aurai dû la quitter avant de partir mais dans la précipitation j'ai un peu oublié.

               -Oui, c'est aujourd'hui,  répondis-je en essayant de paraître décontractée.

               - C'est à quelle heure ?

    Mais elle ne voit pas que je suis essoufflée, décoiffée et surtout que je n'ai aucune n’envie de parler avec mes 2 valises à mes pieds.  Heureusement avant d'avoir eu à trouver une réponse,  la porte de l'ascenseur s'ouvrit sur le rez-de-chaussée.

                  - Au revoir Madame Dubois !

    Je pousse la porte des garages et cours à ma voiture un peu étonnée de ne pas croiser Fabrice. Je jette mes bagages à l'arrière et sors en trompe manquant d'écraser mon ex fiancé. Par pur réflexe,  je ferme les portes de l'intérieur,  l'empêchant ainsi d'entrer dans ma voiture.

                  - Emma ! Me crie-t-il, qu'est-ce que tu fais ? Ouvre-moi, on va parler !

    N'ayant aucune envie de lui faire la conversation,  je décidais de l'ignorer. Le problème c'est qu'il me bloquait un peu le passage et que je ne veux pas lui faire plus de mal aujourd'hui. J'entends mon portable vibrer dans mon sac, l'urgence de la fuite reprend le dessus et je lui dis :

                  - Laisse-moi passer !

                  - Emma ! Tu ne peux pas partir comme ça !

                   - Tu veux parier ?

    Nous nous regardons à travers la vitre. Fabrice voit la détermination dans mon regard,  écarte les mains et me laisse partir. Sans plus attendre, j'écrase la pédale d'accélérateur et le voit rapetisser dans le rétroviseur.

    Dans un premier temps, ne sachant pas trop où aller,  je roule en direction de l'autoroute. Quand j'estime avoir mis suffisamment de distance entre ce mariage et moi  je m'arrête sur un parking d'une station-service. Comme on est samedi,  il est plein mais j'arrive à me trouver un petit coin ou pleurer tranquillement.

    Mais qu'est-ce que j'ai fait ? Je suis en robe de mariée dans ma voiture avec mon mascara qui dégouline,  la fuite m'a fatiguée et j'ai faim.

    Et dire que j'avais tout pour moi ! Un boulot, un futur ex fiancé (fils de mon patron, certes, mais il a aussi des bons côtés), des amis. Et là,  il me reste quoi ? Une robe, une voiture, mes bagages et mes économies.

    Mon portable vibre à nouveau.  Je le sors distraitement et l'éteint. Je ne veux parler à personne pour le moment. J'ai déjà du mal à comprendre mon comportement alors l'expliquer aux autres est au-dessus de mes forces. Je pose le portable sur le siège passager qui tombe par terre.

    Je me penche pour le prendre quand soudain, ma main touche un papier. Je le regarde en me demandant ce que c'est et reconnais une brochure où je lis : " Venez à Montfleuri où la vie vous sourit !"

    C'était Rebecca qui m'avait donné cette brochure. Etant 2 citadines convaincus, nous avions ri quand nous avions découvert que Montfleuri ne comptait que 70 habitants l'hiver et 90 l'été. S'était un petit village de montagne ou l'on pouvait faire des randonnées. Ce retour à la nature nous avait bien fait rire. Je sors mon  GPS et entre le nom de village. L'idée de me cacher à Montfleuri ne m’enchante guerre mais je n'ai pas d'autre idée.  Et puis c’est du provisoire,  histoire de prendre un peu de recul. Le trajet est un peu long mais ça me permettra de réfléchir un peu. Le réservoir d'essence est plein, à moi le bitume !

     

     

     


    8 commentaires


    Suivre le flux RSS des articles de cette rubrique
    Suivre le flux RSS des commentaires de cette rubrique